L’avenir du cabinet d’expertise-comptable

Basée sur des études sur l’évolution du métier d’expert-comptable réalisées par Philippe Barré de b-ready, Stéphane Raynaud de la revue La profession comptable et Sofos et résumées par Bruno Gratian, directeur du CEECA et consultant en GRH

INTRODUCTION

Commençons par un constat, connu, mais qu’il est de bon ton de rappeler avant d’aborder les nombreux points relevés par l’étude. Ce bilan brosse le portrait et l’état actuel des cabinets d’expertise-comptable et du métier d’expert-comptable dans leur configuration moyenne.

Environ 90% des cabinets ont moins de 20 salariés, dont la plupart des collaborateurs sont des comptables généralistes. L’automatisation de la production atteint un niveau d’efficacité intéressant et les progrès s’accélèrent, mais les missions traditionnelles perdent de la valeur aux yeux des clients et cela va s’accentuer. Enfin, la loi PACTE supprime deux mandats de CAC sur trois.

une profession bien installee — CEECA Formations Formations pour Experts-Comptables et Commissaires Aux Comptes

Quelques chiffres qui marquent le positionnement des cabinets en tant que partenaires incontournables des entreprises : entre 7 et 8 TPE-PME françaises sur 10 ont recours aux services d’un cabinet ou d’une AGC, c’est également le cas pour 30% des dirigeants d’association. Un expert-comptable représente pour son client les conseils réguliers d’un professionnel de la gestion.

Un point sur les pratiques. Celles-ci sont ancrées en facturation, 75% des cabinets pratiquant le forfait sur les missions comptables contre 17% au temps passé. A l’inverse 60% des missions sociales sont facturées à la prestation ce qui est une vraie évolution, le conseil étant souvent facturé au temps plutôt qu’en fonction de la valeur ajoutée de la mission.

quelques chiffres 2 — CEECA Formations Formations pour Experts-Comptables et Commissaires Aux Comptes

I. LE CABINET VU PAR LES CLIENTS

Les reproches des chefs d’entreprises à l’encontre de leur expert-comptable

Fait (d)étonnant, 37% des clients regrettent l’absence de conseil prodigué par l’expert-comptable. Cela se traduit par un manque d’accompagnement et de conseil en gestion ainsi qu’un manque d’explications et de pédagogie. L’expert-comptable y travaillerait trop a posteriori, en ayant tendance à trop s’appuyer sur les incitations fiscales, et donc ne serait pas anticipateur. Ajoutez à cela une mauvaise connaissance du contexte et du secteur d’activité des entreprises couplés à un manque de disponibilité et un bouleversement de et dans la profession apparait évident.

Ce point est d’ailleurs appuyé par un rapport qualité/prix jugé insatisfaisant par 28% des clients, qui estiment que le prix est trop élevé par rapport à la prestation, et incluant peu de services complémentaires. Revoir son offre, et notamment son offre de missions de conseil, c’est alors s’assurer une revalorisation de son activité et du rapport qualité/prix qui en découle.

Et si on écoutait les clients ? Quelles sont les prestations attendues le plus par les TPE-PME ?

Sans surprise, l’assistance et la recherche d’informations juridiques, fiscales… ainsi que l’aide à la gestion de l’entreprise (tableaux de bord, calcul des coûts…) trustent les premières places des demandes des clients. Le métier d’expert-comptable reste ici dans une relative zone de confort, où on l’attend naturellement.

Une grande partie des clients sollicitent aussi de l’expert-comptable des conseils en gestion de trésorerie, de négociation de crédit avec un banquier ou encore de gestion de contentieux et de recouvrements clients. Des conseils en gestion patrimoniale sont demandés par près de la moitié des clients (48%) !

Près d’un tiers demandent également des prestations en conseil informatique, en facturation voire en formation. Les besoins clients ne se limitent donc pas au simple champ de la comptabilité en générale, mais bien d’un accompagnement personnalisé et approfondi sur toutes les problématiques que peuvent rencontrer les entreprises à l’heure actuelle et dans le futur.  

et si on ecoutait les clients — CEECA Formations Formations pour Experts-Comptables et Commissaires Aux Comptes
Selon une étude CSOEC « Les marchés de la profession comptable » réalisée en 2016

Au-delà du conseil et de l’accompagnement qui représentent 41% des attentes des clients, ces derniers attendent aussi de la qualité et de la confiance (20%) ainsi que de la proximité et de la disponibilité (15%). On voit que le prix représente finalement peu dans leurs désirs, une prestation de qualité et sur-mesure étant plus importante à leurs yeux. Ici ce sont bien autant la qualité que la proximité qui sont particulièrement attendues.

Selon une étude Les Moulins – Quelles missions demain

ce quattendent les clients — CEECA Formations Formations pour Experts-Comptables et Commissaires Aux Comptes

Les typologies de clients

On peut distinguer 8 typologies de clients différentes :

  • Aux commandes : autonome, importance des pairs
  • Bavard : hyper social, ambassadeur
  • Distrait : hyper sollicité, multitâches
  • Alternatif : partage & collaboratif, sensibilité sociétale
  • Bipolaire : premium & low-cost, infidèle
  • Comparateur : meilleurs prix, bons plans
  • Pressé : réactivité, temps réel
  • Omni-connecté : hyper connecté, hyper informé

Les attentes des clients

les attentes des clients — CEECA Formations Formations pour Experts-Comptables et Commissaires Aux Comptes
Les attentes des clients

II. LE CABINET D’UN POINT DE VUE INTERNE

La question du recrutement

Nous sommes face à un phénomène de « destruction créatrice » comme théorisé par l’économiste Schumpeter : la transformation numérique entraîne progressivement la disparition du métier d’expert-comptable tel qu’il existe mais génère parallèlement de nouvelles opportunités. Les fonctions de production comptable, c’est-à-dire les emplois directement menacés par la déferlante technologique et l’évolution inéluctable du métier, représentent plus de la moitié des salariés des cabinets. Avec le numérique, la connaissance est banalisée. Quelles que soient les missions vendues demain, les cabinets ne vendront plus de la connaissance, intégrée dans les outils, mais bien de la mise en œuvre, de la méthode et du savoir-faire.

Cette situation nous ramène à un second constat alarmant, 30% des collaborateurs ont quitté leur cabinet en 2018, 90% de leur propre initiative. Parmi eux, 44% étaient en poste depuis moins de deux ans. Enfin, près d’un tiers des collaborateurs pensent quitter leur métier avant l’âge de la retraite.

Pour répondre à cette menace et à la pénurie de ressources humaines qu’elle annonce, des choix s’offrent au cabinet afin de s’y préparer.

Elaborer une stratégie : Bâtir la « marque employeur » du cabinet pour se différencier de ses confrères et concurrents. Elle désigne « l’ensemble des problématiques d’image de marque liées à la gestion des ressources humaines et au recrutement d’une entreprise. » Définition Pôle Emploi

Développer sa marque employeur c’est assurer au cabinet d’attirer des profils nombreux et surtout pertinents. Cela permet de développer grandement son attractivité, à condition de la travailler efficacement. Elle concerne notamment la culture de l’entreprise, ses engagements RSE mais aussi l’organisation du travail…

Une anticipation à moyen et long terme est évidemment essentielle. Cela passe notamment par la mise en place d’une GPEC, une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. La GPEC est « une méthode pour adapter – à court et moyen termes – les emplois, les effectifs et les compétences aux exigences issues de la stratégie des entreprises et des modifications de leurs environnements économique, technologique, social et juridique.

C’est une démarche de gestion prospective des ressources humaines qui permet d’accompagner le changement. Elle doit permettre d’appréhender, collectivement, les questions d’emploi et de compétences et de construire des solutions transversales répondant simultanément aux enjeux de tous les acteurs concernés : les entreprises, les territoires et les actifs. » Définition du Ministère du Travail Autrement dit, une GPEC est outil d’anticipation sur les besoins en recrutement et sur les projections de risques de départs.

Un plan de GPEC est donc l’outil idéal pour anticiper les répercussions de l’évolution du secteur sur les cabinets, ainsi que la pertinence de ses choix stratégiques et de leurs conséquences. Le CEECA propose de préparer son plan de formation.

S’ouvrir à de nouveaux profils et de nouvelles compétences : l’évolution du métier d’expert-comptable n’est pas seulement liée à une métamorphose interne et endogène de la profession, mais aussi au bouleversement du marché du travail et de ses acteurs. Penser et repenser une offre adaptée aux nouvelles générations Y et Z apparait de plus en plus nécessaire voire urgent. Comment permettre cela ? Encore une fois, plusieurs alternatives s’offrent aux cabinets. Il est possible de faire le choix de s’adapter au candidat et à son positionnement en alliant acceptation et motivation, comme il est tout à fait possible d’investir en lui via l’intégration et la formation qui s’ensuit.

L’avenir des acteurs des cabinets

L’avenir des dirigeants

L’avenir des dirigeants de cabinets d’expertise-comptable est pluriel, et surtout pluridisciplinaire. Avant tout chef d’entreprise, le nouveau dirigeant revêtira dans les prochaines années de nombreuses casquettes. Irrémédiablement manager RH, il sera aussi expert en conseil, business développer, commissaire aux comptes, homme de confiance sur la fiscalité et les lois, ou encore lui-même coach de dirigeant.

De nombreuses évolutions sont possibles, voire nécessaires pour répondre aux enjeux futurs de la profession mais pour répondre aux nouvelles demandes des clients qui sont eux aussi en train d’évoluer constamment.

L’avenir des collaborateurs

Quel profil pour le collaborateur de demain ? Parallèlement à la fonction du dirigeant, les fonctions des collaborateurs évoluent, au même rythme que l’apparition de nouveaux métiers. Chargé de communication, Assistant RH et RRH, Responsable des méthodes, Responsable numérique et informatique ou encore Responsable du développement des missions de conseil sont autant de fonctions supports dont l’importance grandit chaque jour au sein des cabinets, et qui deviendront essentielles pour soutenir le développement des nouvelles activités du cabinet.

Le collaborateur idéal de demain n’existe pas…encore ! Faut-il recruter des personnes dédiées à chaque rôle et constituer des équipes ? Peut-on transformer les collaborateurs et les aider à évoluer ? Tentons la mobilité interne…

Comment changer ?

Commencer petit, intégrer de nouveaux profils, expérimenter, monter en compétences, mesurer les retombées, faire ses deuils. 

Pour se préparer et aborder l’avenir avec sérénité, il est essentiel d’anticiper celui-ci. Pour cela, des échanges avec les collaborateurs, en équipe mais aussi individuels, est une première étape importante. Ceci passe par l’organisation de brainstorming sur le futur du cabinet et du métier d’expert-comptable, de moments réguliers d’échange pour parler des évolutions, par la ritualisation des entretiens individuels intermédiaires, courts, pour évoquer avec chacun leurs propres évolutions et enfin prodiguer des conseils pratiques et promouvoir les évolutions constatées.

Mais alors, par quoi commencer ?

Réponse la semaine prochaine dans un nouvel article : La stratégie du cabinet

Pour aller plus loin

Préparer son plan de formation

La POEC, un dispositif de recrutement collaborateur

Audit, accompagnement, coaching par le CEECA



05 décembre 22